SURVOL DU 2° FESTIVAL DU CINÉMA TUNISIEN À PARIS

© Ph.Sayah Msadek

Par Hédi Dhoukar pour cinematunisien.com – mars 2009

À l’initiative de l’Association Jeunes Tunisiens, la deuxième édition du Festival du Film tunisien, les 13, 14 et 15 mars au cinéma L’Archipel à Paris, a connu une telle affluence que les organisateurs, malgré l’excellence de leur dévouement, ont été très vite débordés. Visiblement, le succès escompté a dépassé leurs prévisions. La prochaine édition n’en sera certainement que mieux organisée. Il est notamment impératif que les cinéphiles puissent visionner tous les films plutôt que d’être obligés de choisir telle séance et de sacrifier telle autre. C’est également frustrant pour les réalisateurs qui font le déplacement. Ils auraient eu beaucoup à gagner si, en plus de l’assurance que leur film puisse être visionné par le plus grand nombre, ils pouvaient débattre avec des spectateurs par ailleurs très motivés. Tout cela est bien sûr difficile à réaliser, mais, s’agissant d’un groupe qui se réclame de l’illustre filiation des «Jeunes Tunisiens», l’histoire montre qu’à l’impossible nul ne peut être tenu.

Cela pour dire la difficulté de rendre compte de ce Festival éclaté. La contrainte du temps, l’impossibilité de voir toute la sélection, de parler avec les réalisateurs et les acteurs, n’autorisent pas autre chose qu’un survol des thèmes abordés, indépendamment des auteurs et des choix formels.

Comme les rares débats qui ont eu lieu l’ont montré, le thème de la violence est décliné dans la plupart des films, longs et courts, à l’exception de ceux qui ont opté pour le parti-pris de la comédie. Violence multiforme, dont les ramifications épousent bien des méandres : violence de la société, de l’histoire, goût pour l’autodestruction et de la catharsis, fascination de la mort. On l’aura compris, c’est une violence symbolique en quête des formes qui lui permettant de s’extérioriser, de se donner à voir par-delà l’image et à travers elle. En cela, ces cinéastes qui en sont pour la plupart à leurs premiers essais, sont des plus prometteurs. Ils ne reculent pas devant la difficulté, explorent sans complaisance des dimensions cachées de l’être et des aspects peu glorieux de la société. Ils s’inscrivent également dans une tradition esthétique très tunisienne qui, depuis Ali Douagi, aborde les problèmes les plus épineux et les tabous, depuis les marges où la liberté est plus grande, précaire et d’autant plus précieuse. Sans compter que l’artiste lui-même se situe généralement dans la marge.

La marge

Le thème de la marginalité fédère les aspects liés à la violence. Sa meilleure illustration est fournie par le film Ya Soltane el médina (1992), de Moncef Dhouib, présenté dans le cadre d’une rétrospective, «Les premiers films». Il brasse en effet plusieurs sortes de marginaux rassemblés dans un lieu lui-même en marge : une vieille maison de la médina, parabole d’une impasse infranchissable, d’un nœud gordien que personne n’ose trancher, en dépit des tentatives. Ce film est d’une rare noirceur. Sur le plan des personnages et des lieux filmés, l’œuvre s’inscrit dans le même univers tunisois que celui où Férid Boughedir a situé son L’Enfant des terrasses. Sauf qu’il en est l’antithèse absolue : sa face grimaçante est cachée. Il s’articule autour des personnalités opposées de deux frères : un saint et un malfrat, que leur mère utilise judicieusement, l’un et l’autre et tour à tour, pour en faire la source de ses revenus, sans même paraître cynique !

Peinture de plusieurs figures typiques de la marge en Tunisie, le film de Moncef Dhouib dévoile les ressorts qui permettent à ce monde, – à mi-chemin entre la cour des miracles et le lupanar -, de survivre : la crédulité et l’incrédulité, la superstition et la bigoterie, le calcul et la débrouillardise, la candeur et la cruauté…Il fait penser à la pièce «Les Bas-fonds» de Gorki, dans la version cinématographique d’Akira Kurosawa. Mais le réalisateur ajoute une touche de désespoir nihiliste qui achève de faire de cette impasse un cauchemar dont on peut ne pas se réveiller. Même pas par un cri !

Nous rejoignons ici le propos de Boutellis (2008), le court-métrage de Nasreddine Shili. Il nous plonge dans l’univers cauchemardesque de l’enfant d’un chiffonnier qui semble vivre de ce qu’il récupère, loin de la ville. Celui-ci règne en tyran sur son fils et sur sa femme en compagnie d’un associé douteux. C’est le film de la violence totale, despotique, d’une force brute et barbare qui remâche frustrations et fantasmes et qui ne connaît pas de frein à la jouissance du mal qu’elle peut faire à des êtres sans défense. C’est sordide. La laideur de cet univers d’une violence insoutenable ne laisse augurer d’aucun salut. Celui-ci vient toutefois, pour le fils martyrisé, sous la forme de l’épave rejetée par la mer, d’une poupée blonde. Elle tiendra provisoirement lieu d’âme à cette épave brune de la terre et du ciel qu’il représente si bien ; mais à la fin la poupée sera elle-même violentée par le père dans le prolongement du viol du fils, et ce dernier, pour sauver son éclaircie déchiquetée, construira un radeau à la poupée pour la rendre à la mer.

C’est sur un radeau que, dans le court-métrage de Abdelbar Mahmoud, Fundo (2008), un homme passe son temps en compagnie d’un poisson rouge, maintenu flottant dans un bocal, à proximité de son embarcation de fortune. Le parallèle est frappant entre ce poisson dans son bocal et cet homme sur le radeau qui boit du vin à satiété, comme pour s’effacer du monde. s’assommer. À un moment la corde effilochée arrimant le radeau se casse, et il échoue, épave, sur la plage, à côté de son poisson rouge suffocant, métaphore de sa condition. Ici l’idée de l’impasse, de l’enfermement, s’impose avec d’autant plus de force que le film se déroule en mer, avec l’infini pour horizon.

C’est la condition dont veulent s’échapper les harraguas. Ces jeunes rejetés vers la marge par le chômage ou une délinquance bénigne, échouent en bord de mer en train de guetter l’occasion, de s’embarquer clandestinement vers l’Europe, depuis la plage de Hammam-Lif, devenue, pour eux, Aéroport Hammam-Lif (2007), titre de l’excellent documentaire de Slim Ben Cheikh. Malgré la vétusté de ses moyens, c’est un film sur la résolution mûrement réfléchie de ceux qui jouent leur existence à pile ou face ! Pour ne pas parler des connotations géopolitiques que tout le monde connaît et qui renvoient aux sources de la violence historique.

Cette violence historique est sous-jacente dans le film Le Désespoir est assis sur un banc (2009), de Mehdi Hmili, présenté dans le cadre de Cinéma de l’exil. Le moyen-métrage est desservi par son manque de moyens et une bande-son détestable, mais il est sauvé par un acteur prodigieux. On peut y déceler le constat d’échec d’au moins deux générations de Tunisiens bi-culturés, acculturés ou occidentalisés, comme on veut, que le destin a placés sur une voie sans issue. Ils se transforment en épaves pathétiques rejetées dans la marge, s’autodétruisent et entraînent la destruction de leurs proches. Mais ce constat semble concerner les hommes seuls, les femmes paraissant s’en tirer. Quoi qu’il en soit, d’un style à mi-chemin entre le Wim Wenders de Paris Texas de et le Léo Carax des Amants du Pont neuf, ce travail est surtout riche de son potentiel. Il mériterait d’être remis sur l’ouvrage avec des moyens à la hauteur de ses ambitions.

Identité arabe

La violence historique et sociale est, bien entendu, politique. Cet aspect n’est jamais abordé frontalement. Il n’en est que plus présent, à travers diverses visions que s’en font les réalisateurs.

La plus tragique semble être celle qui se déploie dans le court-métrage Essket, (2008), de Faten Hafnaoui. Une jeune femme, poursuivie par deux inquiétants personnages dans les dédales de la médina, trouve refuge dans un sous-sol aménagé sous la maison de son enfance par une ancienne connaissance. Son ordinateur portable contient des images terribles du genre de celles que les médias européens ont récemment occultées lors du carnage de Ghazza par l’armée israélienne. Images des massacres d’enfants arabes, libanais, irakiens, palestiniens, de ruines, de mères éplorées… Le pouvoir au visage anonyme qui la harcèle connaît le pouvoir des images : il cherche à les détruire et à détruire la volonté de ceux qui les produisent. Avec ce film, Faten Hafnaoui fait preuve d’une conscience politique arrivée à maturité qui, pour se référer à un fameux proverbe chinois, «lorsque le doigt montre la lune», regarde bien la lune et non pas le doigt.

Dans la même veine, le petit court-métrage intitulé À l’aube d’une journée d’Aïd (2007), de Achraf Laamar, réussit le tour de force d’aborder, à la manière subtile de Douagi, l’exécution de Saddam Hussein sans que son nom soit jamais prononcé ni son image montrée. Il suffit au spectateur de savoir que le président irakien avait été exécuté à la veille d’un jour d’Aïd. Comme le film précédent, il s’insère dans une vision globale de l’être tunisien appréhendé à travers l’identité et le destin arabes en péril. Avec une touche d’humour noir et de malice bien de chez nous.

Avec Ayan Kan (2007), de Ridha Tlili, nous restons dans le registre symbolique. Dans ce court-métrage, un jeune homme navigue entre la vie et la mort, vivant parmi les morts, mort parmi les vivants. Transposition plastique, morbide à souhait, parfois un peu trop appuyée, d’un vécu intérieur. On est ici dans une marge affleurant l’être et le non-être : la mère de toutes les marges ! Il est intéressant de noter que, là également, la question de l’identité est posée par le truchement de l’arrestation par la police et l’interrogatoire qui en découle. À ceux qui s’interrogeraient sur la pertinence de la transposition symbolique d’un vécu réel, il suffit de comparer la situation du personnage d’Ayan Kan avec celle des harraguas maghrébins pour comprendre qu’elle exprime une même condition d’existence objective et de non existence réelle.

Une saison entre l’enfer et le paradis (2008), le court-métrage de Mourad Ben Cheikh, tourne aussi autour de la problématique de l’identité et de la vérité, – les deux étant liées -, en traitant du thème mystique de l’unité des contraires. Dans un huis-clos, plus théâtral que cinématographique, plus intellectuel que plastique, le film fait le portrait d’un intellectuel qui se collecte avec les contradictions et se gargarise de vin autant que de rhétorique mystique, au point de sacrifier le réel, s’enfonçant irrémédiablement dans une forme d’anéantissement de soi.

Cinéma populaire

Loin de toute symbolique, Le Projet (2008), premier court-métrage de l’acteur Mohammad Ali Nahdi, décline le thème de la violence sous son aspect psychique, personnel, avec la figure d’un délinquant, sous l’angle social, avec le couple de bourgeois, sous l’aspect idéologique avec l’islamiste appréhendé par la police. Et il aurait pu continuer à nous tenir ainsi en haleine et après avoir esquissé un scénario prometteur, si la censure n’était pas venue mettre un terme à ce projet. Devant le talent du réalisateur, gageons que la censure finira par lui laisser un jour la bride sur le cou pour le bonheur des spectateurs et l’intérêt bien compris du cinéma tunisien.

Cinecitta, 7 avenue Habib Bourguiba, (2008), premier long-métrage de Ibrahim Létaïef, est l’exemple même de ce que peut être un bon cinéma tunisien populaire et de qualité. C’est un cinéma sans complexes, irrespectueux comme on peut l’être et, s’il le faut, culotté au point de vouloir rivaliser avec la comédie italienne (d’où le titre) voire de se faire acclamer à Cannes sans y être invité !

Sur un scénario bien ficelé, c’est une comédie déjantée où l’on peut même, cerise sur le gâteau, se délecter de ses clins d’œil qui ne sont pas toujours destinés aux cinéphiles, même s’il faut être Tunisien pour en apprécier la saveur. Le jeu des acteurs, qui mériteraient d’être tous mentionnés, est tout simplement jubilatoire.

La mort

Le thème de la mort court également à travers les films présentés au cours de ce Festival. Il est présent dans plusieurs des films déjà évoqués, La Veille d’une journée d’Aïd, Ayan Kan, Boutellis, Le Désespoir est assis sur un banc, Ya soltane el médina. Il domine aussi des courts-métrages comme Le Fossoyeur (2008), de Ghanem Ghaouar et Le Poisson noyé (2006), de Malik Amara. Le premier ne revêt aucun aspect tragique. Il aborde seulement le problème de la fossilisation des sociétés traditionnelles où il est décidé, une fois pour toutes, que chacun doit rester à sa place, interdisant ainsi le changement. Le second, aborde la même question, de manière plus ambiguë : comment changer en se débarrassant du mal qui semble… immortel ?

Khorma (2001), de Jilani Saadi, présenté dans le cadre de la rétrospective «Les premiers films», traite aussi de ce thème du changement à travers le sujet de la transmission d’un métier, celui d’annonceur public des décès, et de récitant du coran que l’on convie à diverses occasions. Nous avons là aussi affaire à une société traditionnelle, fermée et figée, qui prévoit une place à chacun, y compris aux marginaux. Ainsi, même le surnommé Khorma qui a tout l’air d’un idiot, est intégré en tant qu’assistant du crieur officiel chargé d’annoncer les morts et de superviser les cérémonies à caractère religieux. Jusqu’au jour où se pose la question de la succession de cet homme qui occupe tout de même un poste de «pouvoir». Comment un Khorma peut-il assumer cette tache ? Il se fait que l’idiot n’est pas si idiot. Il est même porteur d’une vision du pouvoir (cynique par ailleurs et matérialiste) capable de bousculer les habitudes. En outre, il est le seul initié à ce poste, et il est impossible de se passer de lui. Quand il prend la relève de son maître, il révolutionne à ce point les habitudes qu’il entraîne un soulèvement contre lui, qui aboutit à sa déchéance. Il y a une cohérence dans ce film et une justesse de ton très rare. La cohérence repose sur une vision qui admet que le changement n’est pas une valeur positive en soi, tout en sachant son caractère inéluctable. Le refuser, c’est se fossiliser et se condamner à une mort lente. La justesse de ton se manifeste à travers l’intérêt du réalisateur pour tous ses personnages qui revêtent, à ses yeux, une importance qui les dépasse, en tant que témoins d’une société en voie de disparition. De ce point de vue, Khorma est une œuvre anthropologique que les Tunisiens redécouvriront un jour comme un précieux point de repère de leur personnalité historique.

C’est tout l’intérêt du film à caractère documentaire, de Nadia El Fani, Ouled Lénine (2007). Une jeune franco-tunisienne, en quête de son identité, revient en Tunisie pour interroger son père, Béchir, sur l’engagement communiste qui a marqué sa vie. Elle est conduite dans la foulée à questionner d’autres figures marquantes du parti communiste tunisien, musulmanes et juives, et d’évoquer l’influence d’un grand intellectuel marxiste disparu, Noureddine Bouarrouj. Ce film qui part de la question de la double appartenance, finit par embrasser la problématique de l’avenir de la nation, tiraillée entre tradition et modernité, entre le communautarisme et l’universalité, fermeture et ouverture. Un film fait pour réfléchir et susciter les débats.

«Et la tendresse bordel !»

Il n’y a aussi, dans ce Festival, des œuvres (courtes) qui se situent d’emblée dans l’universel.

Borderline (2007), de Sonia Chamkhi, est de ceux-là. Il s’agit de la rencontre d’un homme et d’une femme de condition plus que modeste : une bonne et le gardien d’un immeuble en chantier. Ils s’éprennent l’un de l’autre, bien que l’homme soit marié avec une femme restée au bled. Quand il rejoint cette dernière un week-end, il apprend, à son grand étonnement, qu’elle est enceinte. Quand il retourne à son travail et cherche à retrouver la femme qu’il aime vraiment, il découvre qu’elle a quitté son emploi de bonne. Il ne saura pas qu’elle est partie parce que, enceinte de lui, elle ne voulait pas lui poser de problèmes, ou le séparer de sa femme, dont il ignore qu’en son absence, elle s’adonne à la prostitution. Sur une nouvelle de Mohiedine Béjaoui, ce petit film est réalisé tout en finesse et en délicatesse. Il y a du Maupassant là-dedans.

C’est également une réalisatrice, Nadia Touijer, qui signe La Traversée (2008), histoire d’un petit garçon que l’on voit partir d’une ville de banlieue, traverser tout Tunis pour enfin arriver, grâce à l’aide d’un mystérieux personnage, dans un vieux quartier industriel de la capitale. Il est persuadé que, après avoir rempli tout un album avec des vignettes de pots de yaourt, il va gagner la bicyclette qui figure sur la publicité. Mais voilà qu’on lui demande de poser son album sur une pile d’albums semblables et de rentrer chez lui pour attendre… le tirage au sort. Il fait nuit. L’enfant berné doit maintenant refaire la traversée en sens inverse.

Cela se passe de commentaires. Tout comme Lazhar (2008), le petit film de Bahri Ben Yahmed qui raconte l’histoire d’un jeune qui travaille dur pour s’offrir une coûteuse paire  de baskets et qui se la fait voler dans le vestibule d’une salle de prière. Il se met à surveiller les sorties de la mosquée jusqu’au jour où il voit un homme avec les baskets aux pieds. Il le suit et réussit à les subtiliser à son tour mais, au moment de les enfiler, il découvre qu’elles ne sont pas de sa pointure !

En contrepoint de tout ce qui précède, Ryeh (2008), dessin animé de Lotfi Mahfoudh, est un petit bijou de tendresse et de poésie. Sur un thème autobiographique très simple, il déploie des images qui vont du berceau jusqu’à l’âge adulte en passant par le kouttab, l’école primaire, le premier et grand amour, la passion de la mer, la tante conteuse d’histoires, la recherche de l’aimée partie et disparue, l’enterrement de l’oncle, les études parisiennes et le retour de l’ingénieur marié et père d’un enfant. L’amour traverse ces images : amour de la femme, de la nature, de la technique. Lotfi Mahfoudh est doué, mais il cherche encore son style. Le graphisme varie beaucoup. Les premières images évoquent irrésistiblement les Japonais Hayao Miyazaki et Isao Takahata, mais les figures du maître d’école et de l’instituteur puisent dans une inspiration graphique arabo-musulmane, également affirmée dans l’évocation du conte du tapis volant et certaines séquences comme celle, – admirable -, de la recherche de la jeune fille aimée dans la capitale, procède d’un autre registre.

Dans un vote anonyme, le public a décerné au film de cet artiste prometteur le Prix du meilleur court-métrage. Ce faisant, il a plébiscité à la fois le talent et le rêve.

Hédi Dhoukar

©cinematunisien.com


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