SAMI TLILI, RÉALISATEUR SCÉNARISTE : «JE SUIS QUELQU’UN QUI SE RENOUVELLE»

Par Salem Trabelsi – La Presse de Tunisie – Publié sur 23/09/2019

Réalisateur, doctorant en Lettres modernes à l’université Aix-Marseille et titulaire d’un master en Nouveaux espaces littéraires de l’Université Paris 13, il a été formé aux Ateliers Varan (école du cinéma documentaire) à Paris. Membre actif dès son jeune âge au sein de la Fédération Tunisienne des Ciné-Clubs et la Fédération Tunisienne des Cinéastes Amateurs, il a réalisé «Maudit soit le phosphate» en 2012. En 2015, il est membre du comité artistique des Journées Cinématographiques de Carthage (JCC 2015), chargé de la sélection et de la programmation. Actuellement, il est directeur artistique du Festival International du Film de Gabès. Son nouveau documentaire, «Sur la transversale», produit par «Nomadis images» et «Mille et une productions» est sélectionné pour la compétition officielle des JCC 2019.

Entre «Maudit soit le phosphate» et «Sur la transversale», y a-t-il une ligne conductrice que vous suivez en tant que réalisateur ?

En effet il y a un lien entre les deux projets et leur naissance était concomitante dès le début. Cela dit, «Sur la transversale» est différent de «Maudit soit le phosphate», même s’il y a une continuité. À travers ces films, je voulais revenir sur deux épisodes-phares dans l’histoire contemporaine de la Tunisie avec mon point de vue de réalisateur. Dans les deux films, je pars d’un fait historique, mais je le dépasse; je ne fais pas dans l’énumération des faits historiques. Le fait historique n’est qu’un point de départ pour moi, afin de raconter une histoire humaine. Après le premier film, j’ai enchaîné avec «Sur la transversale» et je peux dire qu’il y a un lien certain entre les deux. Les deux films étaient réfléchis comme deux documentaires qui vont se suivre. J’avais même en tête un troisième volet, mais là je pense que je vais expérimenter autre chose. Il y a aussi le fait que je ne veux pas être «coincé» dans une certaine catégorie de films. Je suis quelqu’un qui se renouvelle. Après «Sur la transversale» je compte faire une courte fiction par exemple.

Pourquoi avez-vous mis sept ans entre les deux films ? 

Pour plusieurs raisons. La première est le temps nécessaire au projet et, à mon sens, il faut consacrer à chaque projet le temps qu’il mérite. Ce nouveau projet était à la fois ambitieux et difficile à réaliser. Déjà au niveau de l’écriture et du développement, ça a pris beaucoup de temps. Ensuite il y a eu, tout au long du cheminement du film, toute une série de problèmes à résoudre. Quelqu’un d’autre aurait lâché ce projet en cours de route. L’un de ces problèmes était, par exemple, celui de l’accès aux archives et ce n’est pas rien ! Il y a des images qui existent à la télévision tunisienne ou à la Satpec mais la grande partie de ces images est malheureusement à l’étranger. La lourdeur de la bureaucratie nous a aussi fait perdre beaucoup de temps. Si ce film a finalement abouti, c’est parce qu’il  y a une équipe solidaire et un grand travail effectué par les producteurs pour trouver des solutions à tous ces obstacles. Je peux affirmer qu’il y a eu un grand travail de production, surtout pour récupérer des archives, mais aussi pour résoudre tous les problèmes administratifs qui n’en finissaient pas.

«Sur la transversale» est un projet qui a nécessité beaucoup d’énergie et de bonne volonté.  Cela a eu un impact sur mon moral en tant que réalisateur et je me suis retrouvé parfois démotivé par tous ces écueils.

Pourquoi un film sur le foot ? C’est un film qui aurait pu avoir lieu avant la révolution ?  

Même après le 14 janvier, avec la liberté d’expression qu’il a entraîné, je trouve curieux que peu de faiseurs de films se soient intéressés à ce sujet. Et à l’époque où j’ai fait le premier film, tout en réfléchissant au second, il y avait cette hâte de profiter de cette liberté puisqu’on ne savait pas si elle allait durer ou pas. Aujourd’hui et après huit ans, on peut dire tout de même qu’elle dure encore et il faut toujours en profiter. Le choix du foot n’a aucun rapport avec le timing, mais le projet que je voulais réaliser avait tout simplement cette tendance. Cela dit, le foot a toujours été une composante essentielle dans notre pays, une composante qui a également un aspect politique.

Dans le film, on revient sur l’époque 77-78, aussi bien sur la fameuse épopée de l’équipe de foot en Argentine que sur la tension sociale en Tunisie.

Vous avez également changé de casquette en assumant des responsabilités dans des festivals…

Depuis mes premières années à la FTCA,  je participais déjà à l’organisation d’événements autour du cinéma, entre autres le FIFAK. Après, les choses ont évolué naturellement.
Avant d’être cinéaste, je suis d’abord cinéphile. En 2015, j’ai assumé un poste plus important dans la direction artistique des JCC où j’étais chargé de la programmation. Après cette session, j’ai quitté les JCC de mon propre gré et depuis quelque temps je suis le directeur artistique du festival «Gabès Cinema Fen».

Mais je trouve que c’est une continuité avec ce que j’aime faire et ça enrichit énormément mon travail de réalisateur, puisque je reste à jour sur ce qui se passe dans le monde.

Quelle est la différence entre les JCC et «Gabès Cinema Fen» selon votre point de vue de membre de l’équipe d’organisation ?

Dans «Gabès Cinema Fen», le défi était beaucoup plus important. Les JCC sont un grand événement déjà installé avec 53 ans d’âge, une assise et un public déjà acquis.
A Gabès, le défi est différent parce qu’il était question de fonder quelque chose et c’est différent même dans l’approche.

Quand passerez-vous à la fiction ?

Au mois de novembre, juste après les JCC, nous allons tourner un court-métrage de fiction «Hors-jeu flagrant».

Mais le foot n’est qu’un prétexte pour raconter cette histoire.

Quant au long-métrage de fiction, j’ai déjà commencé à l’écrire, il est encore en développement.

Source : www.lapresse.tn


 

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