AICHA BEN AHMED, UNE JEUNE ACTRICE TUNISIENNE A LA CONQUÊTE DE L’ÉGYPTE

Par Neila Driss – www.webdo.tn – 19 avril 2017

Je connaissais Aicha Ben Ahmed pour l’avoir déjà rencontrée à Tunis et au Festival du Film Africain de Louxor en 2016, lorsque le film Narcisse, Aziz rouhou (2015), dans lequel elle joue le rôle principal, y était en compétition.
J’ai eu le plaisir de la rencontrer de nouveau cette année à l’occasion de la cérémonie de clôture de Sfax, Capitale de la Culture Arabe 2016, puisqu’elle animait cette soirée en compagnie de l’acteur égyptien Khaled Abol Naga.

Par la suite j’ai rencontré à nouveau Aïcha au Caire où elle réside depuis 3 ans. J’en ai profité pour essayer d’en savoir un peu plus sur le parcours de cette jeune actrice, partie tenter sa chance dans le «Hollywood» du cinéma arabe.

Tu es actrice seulement depuis quelques années. Pourquoi et comment as-tu décidé de le devenir ?

Le réalisateur Nouri Bouzid m’avait découverte sur facebook et m’avait contactée. Au début, j’étais méfiante, d’autant plus que le domaine du cinéma m’était complètement inconnu et que je n’avais jamais pensé à devenir actrice. J’avais fais des études d’Art graphique et publicité et à l’époque, j’étais chargée de projet événementiel, donc rien à voir avec le cinéma.

Par ailleurs, je n’avais jamais pensé à devenir un personnage public. Ma liberté est sacrée pour moi, or une personne célèbre est une personne qui n’est pas libre. D’ailleurs je soufre actuellement de ce manque de liberté, et parfois je me dis que si je n’avais pas été actrice j’aurais pu dire, écrire et faire ce dont j’ai envie sans que personne ne puisse s’en mêler ou se permette de m’insulter sans même me connaitre !

T’insulter ? Tu fais référence aux réseaux sociaux ? Tu sais qu’aujourd’hui malheureusement, tout le monde se fait insulter sur les réseaux sociaux, cela n’est pas dû au fait que tu sois connue.

Non, si je n’avais pas été un personnage public, j’aurais eu mon jardin secret, j’aurais eu mes amis, mes publications auraient été privées, donc j’aurais pu être libre de dire tout ce que je voulais. Et c’est ainsi que j’étais. J’étais vraiment grande gueule sur facebook et je disais ce que je voulais et lorsque j’étais fâchée, je le disais. Je m’exprimais vraiment librement. Tout cela me manque. Aujourd’hui lorsque j’ose dire le quart du quart de ce que je disais auparavant, on me descend en flammes.
Nouri Bouzid m’avait donc envoyé le scénario de Millefeuilles et m’avait proposé l’un des deux rôles importants du film. J’avais commencé par objecter que je ne savais pas jouer la comédie, mais il avait insisté et m’avait mise en contact avec Souhir Ben Amara.  Ensuite nous nous étions rencontrés à plusieurs reprises, soit à deux, soit à trois, et nous avions commencé à faire des exercices et à travailler les personnages. Cela avait pris dix mois.
De ce fait, c’est bien Nouri Bouzid qui m’a fait aimer ce métier.  Il avait d’ailleurs une méthode ou technique assez spéciale. J’avais apprécié cela et l’idée a commencé à faire son chemin en moi. C’est ainsi que j’ai pu me convaincre que je pourrais être actrice, interpréter des personnages divers et incarner des rôles auxquels je n’avais jamais pensé.
Pourtant un mois avant le tournage, Nouri Bouzid avait décidé de choisir une autre actrice. Il ne m’en a jamais dit la raison, mais il s’est excusé en public sur Mosaïque Fm et sur Express Fm et a même dit:  «j’espère que Aicha me pardonnera et qu’elle acceptera de jouer avec moi sur un prochain film». Il m’a fait des compliments, mais jusqu’à ce jour, je ne sais pas pourquoi il ne m’a pas prise pour ce rôle.
Ensuite, j’ai commencé à enchaîner les castings. Ce qui m’a permit d’être prise dans un film syrien Mon dernier ami de Joud Said. Le tournage a débuté fin 2011, au début de la guerre de Syrie.

Aïcha Ben Ahmed dans le rôle d’Emilie dans le film syrien «Mon dernier ami»

Tu n’as pas eu peur ?

Si j’ai eu peur, mais j’y suis quand même allée. J’étais morte de peur et pendant tout le vol je tremblais. En plus, je ne connaissais personne, ni le producteur, ni le réalisateur, ni les comédiens. Personne. J’avais été en fait choisie par une assistante tunisienne, Ines Ben Othman, qui entre temps est devenue elle-même réalisatrice. C’est elle qui avait fait le casting parce qu’elle devait faire partie de l’équipe, mais finalement elle n’a pas été en Syrie.

Le réalisateur voulait une tunisienne pour jouer le rôle d’une française. C’était la première fois que je jouais, en plus dans une langue étrangère, avec des gens que je ne connaissais pas et dans un pays en guerre. Mais c’était une des plus belles expériences de ma vie. C’était la découverte.
Pendant que j’étais en Syrie, on m’a appelée pour jouer dans le film Jeudi après-midi (2013) de Mohamed Dammak pour lequel j’avais déjà auditionné. On m’avait prise pour le rôle principal avec Fethi Heddaoui. C’était incroyable !
Et c’est ainsi que j’ai fait la connaissance de Fethi Heddaoui, de Fatma Ben Saidane, de Sawsen Maalej… Je n’arrivais pas à croire que je jouais avec de si grands acteurs et en plus dans un rôle principal!

Pendant le tournage de Jeudi après-midi, Fethi Heddaoui m’a proposée pour Pour les yeux de Catherine de Hamadi Arafa (2012).  C’est grâce à ce feuilleton que le spectateur tunisien m’a découverte.
Juste après j’ai enchaîné avec une participation dans le téléfilm italien Barabas (2012) de  Roger Young avec l’acteur américain Billy Zane, un rôle dans le feuilleton Noujoum ellil 4 (2013) de Mehdi Nasra et un rôle dans la pièce théâtrale Zanket ensè mise en scène par Sami Montacer.

Après une petite pause, j’ai tourné presque simultanément dans les films Narcisse, Aziz rouhou (2015) de Sonia Chamkhi et Zizou (2016) de Ferid Boughedir.
Tout de suite après, on m’a appelée d’Egypte pour tourner dans le feuilleton Mille et une nuit (2015). Le réalisateur, Raouf Abdel Aziz, voulait un visage inconnu pour incarner le personnage de Qamar Zamen. En fait, cette femme avait été découverte amnésique, et pendant tout le feuilleton elle cherchait à connaitre son identité, à savoir qui elle était, qui étaient ses parents…?

Le réalisateur voulait que les spectateurs en regardant le feuilleton se demandent également qui était cette femme. Il a donc fait une recherche sur Google et m’a choisie en voyant ma photo et en visionnant ma bande démo sur Youtube. Il a apprécié mon travail et a insisté pour m’avoir.
Dès la fin du tournage de Narcisse, Aziz Rouhou, je suis donc allée en Egypte. J’ai signé mon contrat et je suis rentrée à Tunis pendant 5 jours pour faire mes bagages et retour en Egypte. Il a fallut que je me prépare pour le rôle : j’ai du prendre des cours d’équitation, des cours d’escrime… J’ai du m’entraîner quotidiennement pendant environ 20 jours. Je faisais aussi des répétitions et j’apprenais à parler en égyptien.
Après j’ai tourné dans le feuilleton Extrait de naissance (2016) d’Ahmed Medhat où j’ai incarné le rôle d’Amal.

Aicha Ben Ahmed dans le rôle de Qamar zaman dans le feuilleton égyptien «Mille et une nuit».

Tu t’es donc installée en Egypte ?

En tournant Mille et une nuit, j’avais compris que c’est en Egypte que je pourrais vraiment travailler beaucoup et que je pourrais avoir la possibilité d’interpréter plusieurs personnages différents.  A Tunis il y a beaucoup moins d’opportunités. L’acteur est quelque part frustré, il faut pratiquement attendre un an pour trouver un rôle, alors qu’ici il y a toujours du travail, qu’il y a moyen d’interpréter plusieurs rôles intéressants et de faire une vraie carrière.

Malheureusement à Tunis, il n’y a pas encore assez de productions. Je suis personnellement folle amoureuse de notre cinéma tunisien, mais ce n’es pas suffisant. Et puisque j’ai eu cette opportunité de travailler en Egypte, pourquoi pas ?
J’ai eu du mal à me séparer de Tunis, de ma famille, de mes amis, de mes repères et toute ma vie. J’adore Tunis, et au début cela a été très difficile, mais mon travail est en Egypte, mon avenir professionnel est ici.
En Tunisie, ils savent tous que je travaillerais avec plaisir pour le cinéma tunisien, même avec des cachets moindres, parce que j’aime le cinéma tunisien. Mais je suis en Egypte pour bâtir une carrière, pour travailler, ce que je ne peux pas  faire en Tunisie. Il n’y a pas assez de films et il y a deux feuilletons par an pour lesquels tous se battent !
En plus, je suis contente de travailler ici. Je suis fière des feuilletons dans lesquels j’ai joué. Il faut dire qu’ici la qualité des feuilletons s’est énormément améliorée, aussi bien sur le plan de l’écriture que de la mise en scène, de la photo… Et je suis heureuse de me voir dans du bon travail. En 3 ans, j’ai fait deux feuilletons et un film. Mais je refuse beaucoup de rôles.

Pourquoi donc ?

Parce que je ne veux travailler que dans des projets intéressants. Je dois être convaincue du personnage, du casting, du scénario et du réalisateur. En Egypte, je me suis placée à un certain niveau, et quitte à ne pas travailler, je ne peux accepter de descendre de ce niveau. J’ai besoin d’être satisfaite de mon travail, sinon, ce n’est pas la peine. J’aurais pu gagner plus d’argent, mais j’ai préféré parier sur la qualité plutôt que sur la quantité. Sincèrement, je n’ai pas droit à l’erreur. Je dois faire très attention. Bien sur, il y a aussi des rôles que j’aurais aimé obtenir sans y parvenir.

Ne regrettes-tu pas d’avoir abandonné ton premier métier ?

Pas du tout. Je me sens dans mon élément. J’aime mon métier d’actrice. Tu ne peux imaginer les sensations et la joie que j’éprouve lorsque je sais que j’ai tourné une belle séquence ! Je n’avais jamais ressenti cela auparavant !

Aicha Ben Ahmed dans le rôle de Zohra dans le film tunisien «Jeudi après-midi»

Y a-t-il une différence entre la méthode de travail des égyptiens et celle des tunisiens ?

En Egypte, vu que c’est une industrie, ils sont plus rapides que nous dans tout. Chez nous pour préparer un feuilleton ou un film, il faut s’y prendre plusieurs mois à l’avance. Alors qu’ici on peut t’appeler juste une semaine avant le tournage !
En Egypte par exemple pour un feuilleton, tu ne reçois pas tout le scénario. Tu n’en reçois qu’une partie, environ la moitié des épisodes. Tu ne sais donc pas comment cela va évoluer. On te dit à peu près ce qu’il va se passer, mais tu découvres au fur et à mesure pendant le tournage. Au début, je trouvais cela fatigant parce que je n’avais pas l’habitude de travailler un rôle sans savoir ou j’allais, mais ensuite je me suis adaptée. C’est ainsi qu’ils travaillent et on s’y habitue.
En Egypte c’est l’industrie, mais chez nous, c’est autre chose. Nous avons de très beaux films. Cela ne signifie pas que leur travail n’est pas de qualité ou qu’il est bâclé. Pas du tout. D’ailleurs certains feuilletons sont d’un tel niveau, qu’on pourrait croire que chaque épisode est un film !
Mais en Tunisie, il y a encore bien des problèmes de production, de distribution…
Nous n’arrivons pas à bien vendre nos films, notre dialecte n’est pas bien compris par les autres pays arabes…

Donc finalement es-tu contente de vivre en Egypte ?

Oui. Quoique vivre seule n’est pas évident. Surtout que chez moi à Tunis, j’étais bien entourée, je vivais avec mes parents, mes frères et sœurs, mes amis et tous mes animaux et du jour au lendemain, je me suis retrouvée vivant seule, dans un appartement, sans connaitre personne. Heureusement que j’ai mes deux chats pour me tenir compagnie !
Au Caire, j’ai un rythme de vie complètement différent de Tunis. Je sors très rarement. Je suis carrément une autre personne, une autre Aïcha. Ce n’est pas facile, mais je suis contente d’avoir appris à être responsable de moi-même.  A Tunis, je ne l’étais pas, j’étais une petite fille gâtée. En Egypte, je mets les bouchées doubles, je me dis que si j’ai laissé mon pays, il faut absolument que je réussisse. Je travaille donc beaucoup, je prends des cours d’anglais, je fais du sport, je prends des cours de coaching. Pour chaque rôle, je contacte un ou deux coachs pour travailler les personnages.

Aïcha Ben Ahmed dans le rôle de Hend dans le film tunisien «Narcisse, aziz rouhou»

Et avec les autres tunisiens en Egypte, quelles sont vos relations ? Tu les vois ou pas ?

Celle que je vois le plus est Farielle Graja, nous sommes très amies. Quant à Hend Sabry, je l’adorais depuis très longtemps et je l’admirais beaucoup. Lorsque je l’ai rencontrée, je n’ai pas du tout été déçue. C’est une personne très bien. Je suis aussi en contact avec Dhafer Abdine et avec le jeune réalisateur Majdi Smiri, alias Maguy. Il vient d’ailleurs de réaliser un feuilleton de 60 épisodes qui a réussit. Ce sont les seuls tunisiens que je vois.

Quels sont vos rapports avec les égyptiens ? Comment se comportent-ils avec vous ?

Sincèrement, les égyptiens sont très agréables. Ce qui est bien et pas bien, c’est qu’il y a beaucoup de bouche à oreilles et l’information arrive rapidement à tous. Donc si tu es une personne bien, tous le sauront et si tu n’es pas bien, pareil, tous le sauront ! En un clin d’œil.
Je n’ai pas eu de problèmes avec eux. J’ai imposé le respect dès mon arrivée et effectivement on me respecte beaucoup. Ils sont par ailleurs très aimables et très serviables.
Nous les tunisiens sommes nombreux en Egypte. A part Hend Sabry, qui est inclassable et qui est une énorme star, certains prennent même des rôles très importants. Par exemple, l’année dernière, dans le même feuilleton, il y avait deux tunisiens dans des rôles principaux, c’était La sortie avec Dorra Zarrouk et Dhafer Abdine. Dhafer Abdine est devenu une star dès son arrivée en Egypte.
Moi aussi, je suis arrivée directement dans des rôles importants. Sans oublier les metteurs en scène comme Shawki Mejri ou Maguy et tous les autres tunisiens, connus ou pas connus, mais qui travaillent beaucoup. Un article dans la presse égyptienne a même affirmé il y a quelques mois que nous avions envahi le cinéma égyptien !
Nous arrivons même à avoir des rôles que des égyptiens qui travaillent depuis des années n’arrivent pas à avoir ! Et si certains ne sont pas contents ou nous voient d’un mauvais œil on ne peut pas vraiment le leur reprocher !
Cette année, lorsque la presse avait annoncé que j’avais un rôle principal dans le même feuilleton que Mohamed Ramadan, j’ai eu plein de commentaires sur ma page facebook de gens qui me demandaient qui j’étais et pourquoi je prenais des rôles aussi importants à la place d’égyptiens ?!
Nous en Tunisie, je sais que nous n’accepterions pas que des étrangers viennent prendre nos places. Si nous avions 3 ou 4 égyptiens ou libanais et qu’ils s’installaient chez nous et prenaient des rôles, je te garantie que cela sera la guerre. J’en suis sure !
Je crois que le seul acteur égyptien qui a tourné en Tunisie et a joué le rôle de tunisien est Jamil Rateb.

Pourquoi est-ce que tu ne sors pas beaucoup ? On ne te voit ni dans les grands événements, ni dans les grandes soirées, ni dans les premières des films…  Pourquoi donc ?

Je pense que c’est un moyen de protection. Peut-être que c’est parce que ce sont mes premières années en Egypte, et que ne connaissant pas les gens et ne sachant pas comment ils fonctionnent, j’ai préféré me protéger.
Je sais que j’ai tort et que dans mon métier, j’ai besoin de sortir, de me faire voir…  Je suis d’ailleurs actuellement en train de faire un effort pour sortir un peu plus. J’ai décidé de changer, de connaitre un peu plus de gens, d’aller dans certains endroits… Il faut en effet que je découvre le pays et que je sois plus sociable. Il faut que je trouve un moyen d’être moi-même. En fait, tel est mon problème en Egypte, depuis que je suis là, je suis devenue une autre personne. Une personne qui a peur, sans même le faire exprès d’ailleurs !

Peur ? ! De quoi as-tu peur ?

J’ai peur de tout. Je pense que j’ai péché par excès. Je me suis trop enfermée chez moi. Là je suis en train de me retrouver moi-même, mais en Egypte et avec les égyptiens. J’essaye d’agrandir mon cercle de relations et de connaitre plus de gens. D’apparaître plus. Pas pour travailler plus, parce qu’on me fait des propositions continuellement et c’est moi qui refuse les projets. Mais je dois aussi commencer à vivre normalement. Il ne faut pas que l’Egypte soit seulement mon lieu de travail, il faut aussi que j’y vive.
Après tout, je passe plus de temps en Egypte qu’en Tunisie. Parfois je sens que j’étouffe et je déprime à force de m’enfermer chez moi et de me renfermer sur moi-même. Je me mets à pleurer et je veux rentrer en Tunisie. Mais petit à petit, j’apprends à être moi-même en Egypte, tout en me faisant respecter.

A ce propos, j’ai une remarque à faire à propos de certains animateurs TV en Tunisie. A chaque fois qu’une artiste dit qu’elle s’installe en Egypte, ces animateurs se mettent à se moquer d’elle et de toutes les tunisiennes en Egypte. Il y en a deux en particulier qui ne nous ratent jamais. Nous sommes pour eux un sujet permanent de moqueries. Peut-être croient-ils que nous sommes en Egypte pour une partie de plaisir ? Ce n’est pas le cas. Nous travaillons ici, nous faisons des efforts et nous peinons…
Et si jamais il y a eu des filles tunisiennes qui se sont mal comportées ou ont laissé une mauvaise impression en Egypte ou ailleurs, il ne faut pas tout mélanger. Un bon journaliste se doit de ne pas faire d’amalgames. Un bon journaliste doit se renseigner sur chaque actrice, ne pas généraliser et surtout ne pas courir derrière le buzz.
Je pourrais concevoir qu’une personne lambda puisse faire ces amalgames par ignorance de la réalité, mais pas un professionnel. Un vrai professionnel, dont le métier est d’informer les gens, n’a pas le droit de venir à la Tv et de dire n’importe quoi !

Et si on te proposait un travail à Tunis ?

Si c’est pour un film, j’y courrais. Si c’est un feuilleton, cela dépend avec qui. Je ne veux pas travailler avec n’importe qui.
L’année dernière, j’ai tourné en Tunisie dans le film historique Saint Augustin du réalisateur égyptien Samir Seif. Il s’agit d’une coproduction tuniso-algérienne. La première du film a eu lieu lors des JCC 2016. Le film a également été projeté à Sfax dans le cadre de Sfax, Capitale de la culture arabe 2016. Actuellement, il est en cours de doublage en anglais pour une sortie aux USA et en portugais et en espagnol pour une distribution en Amérique latine.
Dans ce long-métrage consacré à la vie et au parcours de Saint Augustin, j’incarne Santa Monica, la mère, dans la période d’âge de 25 à 55 ans. Santa Monica, chrétienne très pieuse et très croyante, était connue pour avoir consacré toute sa vie à son fils qu’elle a suivi partout.

Aïcha Ben Ahmed dans le rôle de Santa Monica dans le film tuniso-algérien «Saint Augustin»

Qui t’a choisie pour ce rôle ?

C’est Samir Seif lui-même qui m’a choisie. Il était à Tunis et ses assistants tunisiens lui avaient proposé plusieurs noms. Lorsqu’il est rentré en Egypte, il m’a contactée et m’a prise de suite pour le film.
Pour moi, cela a été une expérience très enrichissante. J’ai incarné un personnage historique, d’un âge assez avancé… C’était beaucoup de travail.
J’adore le cinéma tunisien. J’aime travailler dans le cinéma tunisien. D’ailleurs j’ai mon propre projet de film en Tunisie.

Peut-on en savoir plus sur ce projet de film ?

C’est un projet de film, mais je ne peux pas en dire plus pour le moment. C’est ma propre initiative et cela sera purement tunisien. Vous en saurez plus, plus tard !

Quels sont tes projets actuels ?

Actuellement, j’ai presque fini le tournage du film La cellule de Tarek El Eryan dans lequel j’incarne le rôle de Nouha.

Aïcha Ben Ahmed dans le rôle de Nouha dans le film égyptien «La cellule»

Je devais travailler dans le feuilleton Marzouk et Ito avec Mohamed Ramadan dans le rôle principal, malheureusement il a été appelé pour faire son service militaire et le projet a été reporté à une date ultérieure.
Entre temps Narcisse, Aziz Rouhou a fait une tournée des festivals. J’ai d’ailleurs eu, pour le rôle que j’y incarne, le prix de meilleure actrice au Festival International d’Al Hoceïma au Maroc.
Pareil pour le film Zizou qui a, par exemple, gagné le prix du meilleur film arabe à la dernière édition du Festival International du Film du Caire et qui vient d’être sélectionné  pour représenter la Tunisie dans le cadre de la 24e session du New York African Film Festival.

En Mars dernier, j’ai co-présenté, avec l’acteur égyptien Khaled Abol Naga, la cérémonie de clôture de Sfax, Capitale de la Culture arabe 2016.

Khaled Abol Naga et Aïcha Ben Ahmed animent la cérémonie de clôture de «Sfax, Capitale de la Culture Arabe 2016»

C’était la première fois de ma vie que j’animais une soirée. D’habitude, à chaque fois qu’on me le propose,  je demande un gros cachet pour ne pas être prise, mais cette fois-ci j’ai adoré l’idée. J’ai d’ailleurs demandé un cachet symbolique parce que je voulais le faire. Je voulais représenter mon pays. Et puis l’événement en soi était très important : la Tunisie devait transmettre le flambeau à l’Egypte, 20 000 spectateurs, deux énormes stars Angham et Saber Rebai…. et j’ai aimé le fait que l’Egypte soit l’invitée d’honneur!
Cela m’a aussi permit de connaitre Khaled Abol Naga, une personne assez exceptionnelle. J’ai été très contente, d’ailleurs, de l’accueillir à l’aéroport Tunis-Carthage en tant que représentante de la Tunisie. Je voulais connaitre Khaled. J’adore son jeu, qui est assez spécial. Il nous ressemble. Il a un jeu d’acteur qui ressemble à celui des tunisiens. J’aime ses films, j’aime ses choix. Il me plait. J’apprécie le fait qu’il prenne des risques artistiquement parlant.  Ces dernières années il n’a pratiquement fait que des films d’auteurs (Microphone, Villa 69, Eyes of a thief,  The Unknown Sweet Potato Seller…) ce qui n’est pas évident du tout.

En effet, en Egypte il y a toujours une tentation, surtout lorsqu’on est une star comme Khaled Abol Naga, de faire des films commerciaux pour gagner beaucoup d’argent. Or, non seulement il ne fait pas ce genre de films, mais en plus il produit lui-même des films d’auteurs et aide beaucoup les jeunes réalisateurs. C’est une personne qui prend des risques parce que c’est une personne qui aime le cinéma. J’ai beaucoup de respect pour lui. Beaucoup. Donc je voulais travailler avec lui et j’en ai été très contente. C’est une personne très modeste et très professionnelle.
Voilà, ce sont mes 3 années de ma vie en Egypte.

Et pour conclure cette interview, as-tu quelque chose à dire ?

Mon pays me manque. Énormément.

Neïla Driss

Source : http://www.webdo.tn/

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