LOTFI ACHOUR, METTEUR EN SCÈNE DE HOBB STORY

Par Kamel BOUAOUINA – Le Temps – Publié le 17.07.2009

«J’ai essayé de montrer ce que le public rêve de voir»

La nouvelle œuvre de Lotfi Achour est une fiction documentaire et théâtrale en direct pour trois femmes et deux hommes. Lotfi, qui a fait ses débuts avec la troupe d’Essadikia, est parti en France pour se perfectionner dans le quatrième Art à la Faculté de la Sorbonne.

Il était le premier Tunisien à avoir fait le Festival d’Avignon, et depuis son succès est très grand puisque Lotfi a monté plus de 25 spectacles dont «Oum Kathoum» avec Anouar Braham. Il travaille beaucoup sur le théâtre contemporain. Après «Zeineb» «Achkabad» «Essbaihi» «Hobb Story» est son dernier spectacle qui vient de passer à deux reprises au Festival international de Hammamet.

Nous avons voulu faire découvrir au lecteur davantage sur ce travail. Interview.

Comment est venue l’idée pour monter «Hobb story» ?

  • C’est une fiction documentaire que j’ai réalisée après avoir constaté ce décalage dans la société tunisienne, et plus largement dans la société arabe. C’est un vrai clivage. On est face à des individus clivés qui s’apparentent aussi en forme de schizophrénie entre ce que nous sommes profondément, ce que nous avons envie de vivre, ce dont nous rêvons et ce que nous montrons nous-mêmes. J’ai voulu travailler sur l’amour, un thème où l’on peut comprendre beaucoup de chose de nos sociétés et de nous.

Vous êtes le premier à oser parler des sujets tabous en direct avec le public notamment la virginité, le concubinage, l’acte sexuel ?

  • Il faudrait bien commencer. C’est vrai c’est un nouveau discours sur l’amour.

Vous avez choqué le public qui n’est pas habitué à ces paroles «sexuelles» ?

  • Peut-être ! Moi, je ne le ferai pas pour provoquer le public. En l’absence d’une culture sexuelle, le public cherche à comprendre le corps de l’autre. On ment sur nous-mêmes si on ne parle pas de ces thèmes comme le rapport sexuel, la virginité, le concubinage… Le fait de parler, de se parler, de partager, on arrive à diffuser cette culture et à s’éduquer et à éduquer les autres. «Hobb story» est un film documentaire. Ce sont des jeunes avec qui je me suis entretenu. Et là on découvre des attitudes, des fausses idées et parfois une ignorance totale de tout ce qui entoure cette vie sexuelle. Les gens ont besoin de connaître, de s’informer. On doit montrer ces choses. Pourquoi les cacher !

Mais on voit deux mondes différents dans votre pièce ?

  • Oui, mais je ne sais pas si on est dans une société ou dans plusieurs sociétés. Je pense qu’on est dans une seule société qui n’arrive pas à se reconnaître.

Vous évoquez souvent le Liban. Est-ce un modèle pour vous ?

  • Le Liban ou même l’Égypte font rêver. Non pas parce qu’ils sont des modèles dans le monde arabe. Ce sont deux lieux qui fascinent, certes. Ils apparaissent comme un modèle. Ils ne le sont pas pour moi. J’aime beaucoup le Liban, mais pas ce Liban de la télé et de Rotana.

Vous avez réussi à concilier entre théâtre et cinéma ?

  • Ce n’est pas difficile, car je suis en même temps dans le théâtre et le cinéma. Je suis attiré par les deux. Je pense autant à l’image qu’à la parole. Je dispose d’un certain nombre d’outils pour m’exprimer un texte, un film vidéo …Le spectacle fait dialoguer théâtre et cinéma, acteurs physiquement présents sur scène et personnages filmés.

Et la musique dans tout ça ?

  • La musique de Jawhar Basti est très importante dans ce spectacle. Il y a cinq créations originales. Jawhar a fait un vrai travail d’auteur avec moi sur le spectacle. La musique n’est pas là pour divertir. Mais elle raconte cette histoire à l’image de la vidéo ou des paroles.

Quelle a été la réaction du public en regardant Hobb Story ?

  • L’impression du public est excellente. Le spectacle l’a beaucoup retenu. Nous essayons de diffuser ce nouveau spectacle à Tunis, Beyrouth et Paris.

Vos projets ?

  • Je suis en train de préparer un film documentaire et une fiction.

Kamel Bouaouina

Source : http://www.jetsetmagazine.net/


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