QUINZAINE DES RÉALISATEURS : KHALED GHORBAL ET LE TABOU DE LA VIRGINITÉ

Khaled Ghorbal vient du théâtre. C’est un nouveau venu au cinéma et à Cannes. Samedi, il montera les marches du Palais des Festivals pour la première fois avec Fatma, son premier long-métrage, présenté demain à la Quinzaine des réalisateurs.

Fatma est un plaidoyer en faveur de la femme tunisienne qui, malgré la reconnaissance juridique de ses droits par la loi, demeure, en fait, toujours sous la férule des hommes. Khaled Ghorbal évoque surtout dans son film un sujet tabou : celui de la virginité. Fatma (Awaatef Jendoubi) est née à Sfax dans une famille traditionaliste de la bourgeoisie moyenne. Violée à dix-sept ans par son oncle, forcée au silence, elle garde en elle cette blessure indélébile. Tout en s’occupant de la maison, de son père et de ses frères et sœurs, Fatma poursuit des études. Elle part même pour l’université de Tunis où elle trouve un semblant de liberté. Mais rien ne la satisfait. Jusqu’au jour où elle rencontre Aziz (Bagdadi Aoum), un brillant médecin, et l’épouse. Le bonheur ! Pas tout à fait. Fatma a un terrible secret : elle s’est fait recoudre l’hymen avant le mariage sans l’avouer à Aziz…

«Cette opération est très fréquente, en Tunisie comme en France, explique Khaled Ghorbal, installé en France depuis 1970. J’ai été très surpris de l’apprendre. Cela traduit un malaise profond par rapport à la réalité d’aujourd’hui où la femme prétend disposer de son corps. Cela montre aussi que le poids de la tradition est encore très fort, que le machisme est le fruit de l’éducation donnée par les mères. Tant qu’elles continueront à élever leurs garçons dans cette optique, les mentalités et le statut de la femme ne changeront pas».

Aziz, le mari de Fatma en est la preuve. Fatma, lasse de vivre dans le mensonge, lui apprend la vérité. Au lieu de pardonner et de tenter de comprendre les raisons de ce silence, il suit aveuglement l’avis de sa mère. Il divorce. Outre Fatma, Khaled Ghorbal esquisse aussi, à travers les personnages des deux amies de son héroïne, deux autres portraits de femmes tunisiennes bien réels.

B.B.

«FATMA» de Khaled Ghorbal

(Tunisie-France), sortie en octobre-novembre

Source : Le Figaro du 11 mai 2001


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