CINÉMA TUNISIEN ET INTERNET : POUR UNE MEILLEURE PRÉSENCE SUR LA TOILE

Par Mahrez KAROUI La Presse de Tunisie – 5 février 2010

Pas moins de 1.260.000 pages. C’est ce que nous propose le moteur de recherche Google comme réponse à notre requête «cinéma tunisien». Aucun internaute, aussi doué soit-il, ne peut parcourir ne serait-ce que le 1/10° des sites indiqués.

Cependant, on peut conclure que le cinéma tunisien est largement présent sur la toile. Bien évidemment, les pages qui s’affichent ne renvoient pas toutes à des sites en rapport direct avec le cinéma, ni même avec la culture. Cela va du site spécialisé dédié exclusivement au cinéma tunisien jusqu’aux pages où les mots «cinéma» et «tunisien» figurent presque par «accident». Les chevronnés du Net savent qu’avec Internet l’information est à la fois facile et inaccessible. Pour parvenir à dénicher l’information recherchée, il faut tout de même quelques astuces et beaucoup de patience, sans parler de la pertinence et de la fiabilité de l’ensemble des informations, divulguées généralement sans grande précision. Toutefois, cela atteste quand même de l’intérêt de plus en plus grandissant qu’accordent les différents acteurs du secteur cinématographique en Tunisie (professionnels, institutions publiques, associations et simples cinéphiles…) aux nouveaux médias. Mais que nous proposent réellement les sites web tunisiens sur le cinéma ?

Les festivals

Si le site officiel du ministère de la Culture et de la Sauvegarde du patrimoine (www.culture.tn) comporte généralement une rubrique sur le cinéma tunisien, il est dommage que ces pages ne soient pas actuellement disponibles en raison des «révisions en cours» selon le message affiché actuellement sur le site. On ne peut alors qu’espérer que le site reviendra très prochainement avec une matière plus élaborée et un design plus attrayant. Quant au site officiel des Journées cinématographiques de Carthage (www.jccarthage.org), on se rappelle l’embarras de la direction de la session précédente (JCC 2008) face à un site qui affichait, à quelques jours de l’ouverture du festival, des informations remontant à 2006. Cependant, nous sommes très étonnés que le site en question, publié quand même en trois langues (arabe, français et anglais), continue jusqu’à aujourd’hui d’afficher des données relatives à la session précédente ! À quelques mois seulement de la prochaine session, on ne peut que «revisiter» les archives de la 22e édition du plus grand festival du cinéma sous nos cieux. Si le site offre à ses visiteurs la possibilité de télécharger gratuitement l’ensemble de la documentation du festival, ce qui est très pratique pour les journalistes, les rubriques sur l’historique des JCC et le cinéma tunisien méritent plus d’approfondissement. L’idée d’intégrer des séquences vidéo ne serait pas, bien au contraire, de trop, à notre sens, pour un site qui s’intéresse à l’image en premier lieu.

Concernant le Festival international du film pour l’enfance et la jeunesse de Sousse (Fifej), on peut visiter le site officiel www.fifej.net. Le menu du site, qui semble à première vue riche et alléchant, s’avère très vite décevant car la plupart des pages, mis à part les rubriques traditionnelles telles que le règlement général ou la présentation du Festival, ne fonctionnent guère. Ainsi, les pages d’archives affichent le message suivant : «Bienvenue dans la zone Archive ! Cette partie est en cours de construction. À bientôt». L’espace personnel que le site propose aux visiteurs ne répond pas. Même les pages dédiées à la présentation des films et à la revue de presse sont vides.

Le site des Rencontres cinématographiques de Hergla, organisées par l’Association culturelle Afrique-Méditerranée et qui auront lieu cette année du 3 au 8 août 2010, s’affiche très modeste et sans aucune prétention (www.herglacinema.org). Toutefois, l’internaute est séduit par l’originalité de la présentation qui reste, somme toute, très proche de la vocation du site, à savoir le cinéma. Des textes trop courts certes, mais allant à l’essentiel avec des vidéos et des photos relatant les différentes sessions du festival. Ce site, au moins, nous donne la date de la prochaine session et c’est déjà ça !

L’association «Ness El Fen» qui organise, depuis maintenant quatre ans, le festival «Doc à Tunis», propose elle aussi dans son site internet des pages consacrées exclusivement au festival (docatunis.nesselfen.org/index.php). Conçu et publié en trois langues, ce site dénote un souci esthétique prononcé. Il est doté de plusieurs rubriques correspondant aux différentes sections du festival et propose une matière variée entre texte, son, image et vidéo. Néanmoins, les responsables du site n’ont pas jugé utile de mettre à jour leurs informations, même si près de deux mois seulement nous séparent de la prochaine session.

Un autre festival dispose, lui aussi, de son site internet. C’est le Festival du Film tunisien à Paris, organisé par l’association Jeunes Tunisiens (www.festivaldufilmtunisien.com). Ici également, on constate un effort certain sur le plan graphique. L’identité visuelle est plus professionnelle, avec des images et des textes animés. On peut même visionner des vidéos de courts-métrages tunisiens. Au niveau de la matière proposée, elle est exclusivement en langue française vu que le Festival se passe à Paris. Hélas! les informations datent de mars 2009.

L’on se demande alors pourquoi nos festivals de cinéma dépensent autant d’argent et d’énergie dans la création de sites web officiels si, d’emblée, ils considèrent que ces derniers n’ont aucune utilité en dehors de la période du festival ? S’il est vrai que la vocation principale du site est de promouvoir la manifestation, il est indéniable qu’il est aussi appelé à être actualisé tout au long de l’année afin de maintenir le lien avec les internautes. D’autant plus que le suivi à faire ne demande pas la mobilisation de gros budgets.

Par ailleurs, d’autres festivals, tel celui du film amateur de Kélibia (Fifak) ou encore celui du court-métrage de Kairouan, continuent malgré tout à ignorer l’existence d’Internet, préférant des modes de communication classiques, sinon dépassés.

Les associations

Au niveau des associations cinématographiques, si la Fédération tunisienne des ciné-clubs (Ftcc) possède déjà son site web officiel (www.laftcc.org), la Ftca (Fédération tunisienne des cinéastes amateurs) et l’Atpcc (Association tunisienne pour la promotion de la critique cinématographique) peinent encore à se tailler une place sur le Net. Ainsi, la Ftca s’est contentée pour le moment d’un blog pour le moins «amateur» (http://ftca.artblog.fr/), tandis que le site de l’Atpcc (www.atpcc.org.tn) n’est toujours pas tout à fait fonctionnel. Pour le site de la Ftcc, mentionné plus haut, il convient de penser à une version en arabe qui permettra certainement une meilleure exploitation de la riche documentation dont dispose la fédération. D’autre part, certaines rubriques ne présentent que le titre et restent sans contenu !

Les professionnels

Si les sociétés de production ont bien saisi l’intérêt que représente l’Internet pour leur activité et ont créé leurs sites officiels voilà maintenant des années, les cinéastes et les techniciens quant à eux semblent encore traîner. Hormis les cinéastes Nidhal Chatta (dommage uniquement en anglais et Néjib Belkadhi et Imed Marzouk («Propaganda Films») qui possèdent un site officiel en bonne et due forme, plusieurs n’ont même pas un compte Facebook. Ce qui oblige les usagers du Net à faire le tour de plusieurs sites pour pouvoir établir le parcours d’un cinéaste. On s’attend donc à ce que certains sites de réalisateurs soient prochainement mis en ligne.

Un cas à part

Parmi tous ces sites, une seule adresse semble faire l’exception. Il s’agit de www.cinematunisien.com. Créé il y a quelques années par deux jeunes cinéphiles (Nejib Riahi et Mohamed Khiri), ce portail s’est vite imposé comme une référence pour ceux qui cherchent des informations sur le cinéma national. Ce site, régulièrement mis à jour, propose toutes sortes d’informations sur le cinéma tunisien : les sorties en salles, les fiches des films, les festivals, les biographies des réalisateurs ainsi que des articles de critique et des interviews avec les artistes. Au fil du temps, il a réussi à constituer une sorte de base de données où on peut trouver l’affiche d’un film ancien comme on peut trouver les derniers échos d’un tournage récent. À la fois sobre et élégant, ce site propose des informations sur les différents secteurs de la filière cinématographique. Des associations aux producteurs et des techniciens aux écoles de cinéma, il essaye de suivre l’actualité cinématographique au jour le jour. Il propose même un forum où les internautes peuvent s’exprimer sur un film, un cinéaste ou un événement cinématographique. Reste qu’une seule hirondelle ne peut pas faire le printemps. Nos sites doivent se multiplier et offrir aux internautes une matière plus diversifiée et plus complète.

Mahrez KAROUI

La Presse – 5 février 2010

Source : http://www.lapresse.tn/


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