HASSAN DALDOUL, PRODUCTEUR DES SIESTES GRENADINE – INTERVIEW

Propos recueillis à Sousse par Philippe Descottes – cinema.aliceadsl.fr – 14/11/2001

Réalisateur et producteur, Hassan Daldoul est membre du jury du 5e FIFEJ de Sousse. Il a produit également Les Siestes grenadine. Juste avant la première projection du matin, nous avons profité de cette double actualité pour lui poser quelques questions…

Quand vous êtes-vous lancé dans la production cinématographique ?

  • Mon premier film en tant que producteur remonte à 1970… C’était Viva la muerte de mon ami Fernando Arrabal, qui me considérait comme «son père». Mais à cette époque j’exerçais différents métiers du cinéma, la production bien sûr, mais aussi la réalisation ou la régie. C’est en 1981, après mon départ de Tunisie, que je me suis véritablement orienté vers la production. À ce jour, j’ai produit une bonne vingtaine de films, parmi lesquels Les Baliseurs du désert (1986) et Le Collier perdu de la colombe (1991) de Nacer Khemir, Halfaouine-L’Enfant des terrasses de Ferid Boughedir (1990), Écrans de sable de Randa Chahal Sabag (1992), mais aussi La Promesse des frères Dardenne (1996).

Comment êtes-vous arrivé sur le projet des Siestes Grenadine ?

  • En fait, j’avais déjà produit les deux premiers films de Mahmoud Ben Mahmoud, Traversées (1982) et Poussière de diamant (1992). Bien avant le tournage de ce deuxième film, Mahmoud Ben Mahmoud et moi avions l’idée de développer un sujet sur les mères et les enfants d’Alger, sur ces gosses qui sont enlevés parce qu’ils sont de culture différente. On a passé beaucoup de temps à rechercher des financements. J’ai même essayé d’intéresser Tarek Ben Ammar. Au fil du temps, le sujet est passé de mode. Mahmmoud l’a repris dans les années 95/96, pour le ramener à une vision plus personnelle… Nous voulions ramener l’Afrique à elle-même ; il n’est pas nécessaire de toujours choisir le chemin de l’émigration. À l’intérieur, on peut essayer de vivre, il est inutile de fuir. Les Siestes grenadine est construit par touches. Mahmoud a refusé de faire un film avec des slogans politiques.

Le financement a-t-il été facile ?

  • Nous nous sommes heurtés à d’autres difficultés que celles de budgets. En Europe, par exemple, dans la recherche de financements, on nous a reproché que le personnage principal ne pouvait pas exister dans ce monde… Ce parcours Sud/Sud, au lieu de Sud/Nord, avec la «pétillance» de cette jeune fille, n’était pas possible à leurs yeux. Enfin, même si nous étions une co-production, tuniso-franco-belge, nous n’avons pas bénéficié de l’avance sur recettes, car le film n’était pas parlé à 80% en français.

Quels sont vos projets ?

  • Je suis déjà ravi que Les Siestes grenadine ait été très bien accueilli en Tunisie. Le film est sorti au moment des élections présidentielles, il n’a pas été censuré et il a touché beaucoup de monde. Après, je vais travailler sur Les Années de la miséricorde, qui sera la première fiction saoudienne, et deux projets tunisiens de haut niveau que j’espère pouvoir proposer au public assez rapidement. Le premier, Toura  Foura ou les margoulins, qui sera réalisé par Moeze Kamoun, sur le ton de la comédie à l’italienne, ou «comment le plus gros poisson mange le plus petit»… sur fond de magouilles et d’affaires. Le second, qui sera le quatrième film de Mahmoud Ben Mahmoud, La Fille du vent, du nom de l’île tunisienne qui a été vendue à l’Italie au XIVe siècle et qui est un lieu de passage de l’émigration vers l’Italie. Ce drame sera co-produit par les frères Dardenne.

Quel est selon vous l’impact d’un festival comme le FIFEJ ?

  • Il est organisé pour une bonne partie par des personnes qui appartiennent à la Fédération tunisienne des ciné-clubs. C’est une structure indépendante qui a beaucoup contribué à créer et à défendre le cinéma tunisien, en totale harmonie avec l’Association des cinéastes tunisiens dont j’ai eu la responsabilité pendant plusieurs années. Avec les ciné-clubs, on se déplaçait pour parler du cinéma et des films, engager des débats. Ce mouvement s’est tassé par la suite. Mais le fait que l’on redonne une priorité à ces personnes, pour un festival consacré à la jeunesse, est important. Le Festival devient un lieu de «parlote», où s’expriment et s’échangent des idées, quelles qu’elles soient. D’autre part, Sousse n’est plus «la ville de baise de l’été». Elle se transforme le temps du Festival en un endroit où les jeunes, qui viennent apprendre le cinéma ou la comédie et exercer leur droit légitime à la parole, confrontent des points de vues différents avec d’autres jeunes et des professionnels venus de tous les horizons.

Propos recueillis à Sousse par Philippe Descottes

Source : http://cinema.aliceadsl.fr


Soyez le premier à commenter

Poster un Commentaire