LA VOIX DE HIND RAJAB, DE KAOUTHER BEN HANIA

Par Lamia CHERIF – Le Temps – dimanche 14 septembre 2025

Le film «La Voix de Hind Rajab», réalisé par la cinéaste tunisienne Kaouther Ben Hania, a été projeté vendredi à la salle Colisée de Tunis lors d’une séance réservée à la presse. Cette projection a permis aux journalistes et aux professionnels du cinéma de découvrir une œuvre qui a remporté le Lion d’Argent à la Mostra de Venise. Inspirée d’une tragédie réelle survenue à Gaza, le film intègre des témoignages et des enregistrements audio des appels de secours. Il sera disponible dans les salles à partir du 17 septembre.

Un cri d’alerte à travers le cinéma

Le scénario s’appuie sur un fait réel qui s’est déroulé le 29 janvier 2024. Hind Rajab, une petite fille palestinienne de six ans, s’est retrouvée seule dans une voiture avec les corps sans vie de sa famille, après une attaque menée par l’armée israélienne.

Elle a passé plusieurs heures au téléphone avec les secours, dans l’espoir d’être sauvée. Sa voix d’enfant, effrayée et pleine d’espoir, a été enregistrée. Cet enregistrement est devenu viral. Il a choqué l’opinion publique dans le monde entier. Kaouther Ben Hania a choisi de faire de cette voix le cœur de son film.

La réalisatrice utilise une mise en scène simple et claire. Elle n’a pas montré la violence de manière frontale, mais elle a filmé le silence, l’attente et l’angoisse. Le spectateur ne voit presque rien, mais il entend tout.

Ce choix donne une force au film à travers le silence, l’impuissance et l’injustice. La voix de Hind devient ainsi un témoignage vivant. Elle rappelle que chaque vie compte, surtout celle d’un enfant pris dans l’horreur de la guerre.

Le film se déroule dans un seul lieu. Ce cadre unique accentue le sentiment de claustrophobie. Le spectateur partage l’enfermement de Hind. Il ressent son impuissance face à l’injustice. Le jeu des acteurs palestiniens comme Amer Hlehel, Clara Khoury, Motaz Malhees et Saja Kilani apporte beaucoup de justesse au récit. Le film ne cherche pas à expliquer le conflit. Il se concentre sur l’humain, sur une voix, sur une détresse et un abandon.

Présenté à la Mostra de Venise en 2025, le film a reçu une ovation du public. Il a également remporté plusieurs Prix importants, dont celui du Leoncino d’Or et le Prix de la Croix-Rouge italienne. Il a aussi obtenu une mention spéciale de l’UNICEF. Ces récompenses montrent que le film dépasse les frontières. Il touche toutes les consciences.

La Tunisie a décidé de présenter «La Voix de Hind Rajab» aux Oscars 2026 dans la catégorie du meilleur film international.

Malgré son rythme lent et l’absence de scènes spectaculaires, le film a réussi à maintenir le spectateur. Il ne raconte pas une histoire, mais il lance un message au monde sur la situation de l’enfance en Palestine. Kaouther Ben Hania donne la parole à une enfant qu’on a tenté de faire taire. En utilisant un vrai enregistrement.

Un choix artistique risqué mais intelligent, qui a transformé le silence en cri et l’absence d’image ou d’action en une présence réelle de ce que se passe sur le terrain. C’est un appel à la justice, à la solidarité.

Le cinéma peut encore porter des messages forts. Il peut réveiller les consciences et dénoncer les injustices. Grâce à cette œuvre, Kaouther Ben Hania confirme son rôle de cinéaste engagée et prouve que l’art peut donner une voix à celles et ceux qu’on n’entend jamais.

Lamia CHERIF

Dimanche 14 septembre 2025


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