KÉLIBIA À LA CROISÉE DES CHEMINS

Une scène du film «Le pain» réalisé par Chédly Brahem, Médaille d’argent
Une scène du film « Les Bannis » de Mohamed Khiri

Par Taoufik YACOUBI – La Presse du 5 septembre 1975

Après plus de dix ans d’existence, on devait s’attendre à ce que le Festival international de film d’amateur atteigne sa vitesse de croisière et ne connaisse plus les problèmes rencontrés lors des précédentes sessions. Ce ne fut malheureusement pas le cas. Dès le premier jour, on présentait un certain flottement dans l’organisation et une carence que les efforts personnels de quelques personnes animées de bonne volonté n’arrivaient pas à surmonter. Il est grand temps, si on veut assurer à ce Festival toutes les chances de succès, de lui consacrer les moyens financiers et humains dignes d’un festival international. Il ne doit plus y avoir de place pour les solutions de facilité adoptées dans le passé.

Les conditions de projection d’abord, qui sont loin d’être satisfaisantes. Dans la journée, le public ne dispose que d’une salle de 200 places qui suffit à peine à contenir les jurys et les festivaliers.

Le soir, avec les projections en plein air, c’est l’assaut vers les chaises des restaurants. Les plus chanceux parviennent à se procurer un siège, le reste est assis à même le sol. À ce propos, on se demande pourquoi on n’utilise pas le théâtre de plein air de la localité. Ce qui permettrait d’ailleurs aux Kélibiens de suivre de près le Festival.

Certains habitants interrogés n’ont jamais vu de films amateurs, alors que le Festival se déroule à quelques dizaines de mètres de chez eux. Un autre aspect auquel il faut penser également : l’hébergement. Certains cinéastes amateurs et cinéphiles ont dû rebrousser chemin ou ont été obligés de faire du camping, faute de place dans la Maison de Jeunes. Il est donc nécessaire de prévoir une structure d’accueil adéquate, surtout que le nombre des participants augmente d’année en année.

Toujours dans le même registre : la sélection des films ; il aurait mieux valu retenir la moitié des 90 films proposés à la compétition, d’autant plus qu’un grand nombre ne présentait aucun intérêt. Il est clair que sélection ne veut en aucun cas dire censure.

Il est indispensable à notre avis que le Festival se consacre chaque fois à un thème précis : film documentaire, film de recherche.

Ce qui permettra d’une part aux participants de débattre et d’étudier au cours d’un festival un ou deux genres de films, de mieux cerner les sujets et d’en tirer donc le meilleur profit ; d’autre part de permettre aux cinéastes amateurs de se «spécialiser» en quelque sorte dans une catégorie de films.

Les films tunisiens : de la maturité mais…

Comme nous en avons rendu compte, les cinéastes amateurs ont mis l’accent cette année sur le documentaire.

Un genre qui n’est pas neutre ou inoffensif comme on pourrait le croire à tort. La caméra, lorsqu’elle est entre de bonnes mains, devient un moyen d’investigation efficace qui témoigne sur la vie quotidienne, les contradictions, les espoirs… Ces documentaires annoncent également une nouvelle génération de cinéastes amateurs, des lycéens pour la plupart après les Bouden, Kmicha, Kalsi…

Toutefois, les bonnes intentions de ces jeunes ont été souvent trahies par l’expression, images sur ou sous-exposées, montage défectueux, cadrages ratés… Et c’est à juste titre que le Faucon d’Argent a été décerné au «Pain», de Chédly Brahem, qui a su éviter tous ces défauts. Ce point n’est pas d’ailleurs sans relation avec certains problèmes inhérents au fonctionnement de la fédération, comme il ressort d’un petit sondage que nous avons effectué auprès de quelques jeunes cinéastes lors du Festival.

T.Y.


 

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