LES JOURNÉES CINÉMATOGRAPHIQUES DE CARTHAGE RÉSISTENT AU CORONAVIRUS

Cérémonie de clôture des JCC au théâtre municipal de Tunis, le 28 novembre 2015 © Nicolas Fauqué

Par Jane Roussel – jeuneafrique.com – 17 décembre 2020

En pleine pandémie de coronavirus, le festival des Journées cinématographiques de Carthage (JCC) se tiendra bien en présentiel, du 18 au 23 décembre. Mais dans quelles conditions ?

En repensant à 2020, on se souviendra d’une année où la culture n’a pas eu son mot à dire. Les salles de cinéma et de théâtre ont passé le plus clair de leur temps fermées et les festivals ont été annulés. À quelques rares exceptions près, comme les Journées cinématographiques de Carthage (JCC), en Tunisie. La 31° édition aura bien lieu du 18 au 23 décembre. Les participants pourront en profiter non pas derrière leur écran d’ordinateur, mais bel et bien assis dans un fauteuil, face à la toile.

Confrontée à la situation sanitaire, l’équipe des JCC avait trois options : la plus courante, annuler ; la plus osée, maintenir ; et la troisième, s’adapter. C’est ce dernier choix qui a été fait, explique le directeur général Ridha Behi : « décaler le festival, loin des pics prévus de la propagation du virus», et par là-même faire l’immense pari que la célébration cinématographique pourrait se faufiler entre les restrictions.

La possibilité d’un refuge

Après tout, rappelle le réalisateur et producteur tunisien, les JCC sont nées de drames et de grands mouvements mondiaux : «la réforme agraire et son échec annoncé en Tunisie, l’après indépendance de l’Algérie, la guerre du Vietnam, le conflit israélo-arabe, le bouillonnement des jeunes dans le monde, la révolution des mœurs et de la mode en Occident». Les JCC avaient alors pris une place importante dans la société tunisienne, permettant la fédération de ciné-clubs, d’espaces de débats et de rencontres entre cinéastes amateurs… Il n’était pas question de renoncer à cela, même en 2020.

Il s’agit aujourd’hui d’offrir une porte de sortie «à un public malmené, déprimé par la fermeture des lieux culturels et sociaux», affirme Ridha Behi. Comme pour continuer de croire à l’après, et trouver dans le cinéma la possibilité d’un refuge en attendant. En témoigne l’affiche de cette 31° édition, signée Kadar Nefla : «Cette ouverture vers la lumière est un déni des temps obscurs qui nous accablent et un espoir de renouveau qui nous console», souligne cette graphiste.

Affiche des Journées cinématographiques de Carthage.

Mais pour accéder à cette consolation, tout restait à revoir, à adapter, jusqu’au principe même du festival. Chaque année, les JCC dévoilent une sélection de films lauréats d’une compétition qui a lieu en amont. Faute de certitudes concernant le maintien du festival à l’époque, cette dernière avait dû être annulée.

Sans nouveaux films, comment maintenir alors l’esprit des JCC ? «Dans ces conditions, nous avons jugé qu’une édition consacrée à la mémoire et aux hommages était la meilleure des solutions», explique Ridha Behi. Le festival s’est ainsi mis en quête de joyaux cinématographiques présentés lors des JCC depuis 1966. Et c’est le cinéma tunisien qui sera finalement à l’honneur, avec la rediffusion d’œuvres d’Abdellatif Ben Ammar, de Salma Baccar, d’Ala Eddine Slim et de Sarra Abidi, entre autres.

Règles strictes

L’autre défi de taille était, bien sûr, de négocier la tenue du festival et d’établir un protocole sanitaire qui lui permettrait d’avoir lieu sans menacer la santé de ses participants. « Nous avons proposé au comité scientifique du ministère de la Santé un protocole largement inspiré de ceux des festivals de Venise et de Montpellier », précise le directeur général.

Une fois celui-ci accepté et adopté, il a fallu supprimer les queues à l’entrée et les guichets, et les remplacer par des achats en ligne. Internet a aussi pris le relais pour dévoiler le programme et le quotidien du festival. Le taux de remplissage des salles a été réduit à 30 % et le nombre de projections a été réduit à deux par jour, pour permettre une désinfection et l’aération entre chaque séance.

Bien sûr, les spectateurs devront être munis de masques. L’équipe du festival en distribuera à ceux qui n’en auraient pas, ainsi que du gel hydroalcoolique. Une unité sanitaire est par ailleurs mise à disposition des invités. Autant de règles strictes, mais simples, qui permettront «de faire (re)découvrir, aux jeunes et aux moins jeunes, des films qu’ils n’auraient pas l’occasion de voir d’ordinaire», se réjouit Ridha Behi.

Source : https://www.jeuneafrique.com/


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