UN FILS, DE MEHDI BARSAOUI ENCHANTE LE PUBLIC DU FESTIVAL INTERNATIONAL DU FILM DU CAIRE

Par Neila Driss – www.webdo.tn – 29 novembre 2019

Après Venise, Hambourg, Londres, Mumbai, Namur et Carthage, le film tunisien «Un fils» (Bik N3ich) de Mehdi Barsaoui, avec dans les principaux rôle Sami Bouajila (Prix de la meilleure interprétation masculine, section Horizons, à Venise pour son rôle de Farès Ben Youssef) et Najla Ben Abdallah, a fait l’ouverture de la compétition Horizons du cinéma arabe de la 41ème édition du Festival International du Film du Caire (CIFF) en projection gala (ou avec tapis rouge), à laquelle ont assisté, outre le réalisateur et l’actrice principale, le producteur Habib Attia et le président du CIFF Mohamed Hefzy, plusieurs acteurs et professionnels du cinéma égyptien et étranger, ainsi qu’un large public venu découvrir ce nouveau film tunisien.

«Un fils» est le premier long-métrage de fiction réalisé par Mehdi Barsaoui, qui avait commencé sa carrière cinématographique par trois courts-métrages : «À ma place» (2010), «Bobby» (2013), et «On est bien comme ça» (2016), qui avait remporté le Muhr d’Or du meilleur court-métrage au Festival International de Dubaï.

Synopsis : Tunisie, été 2011. Farès et Meriem filent des jours heureux avec Aziz, leur fils de 11 ans. Durant un séjour dans le sud du pays, un événement vient changer le cours de leur vie. Alors qu’une course contre la montre s’enclenche, des vérités longuement enfouies commencent à refaire surface.

L’équipe du film «Un fils» sur le tapis rouge du Festival International du Film du Caire

«Un fils» est un très beau film qui traite principalement deux thèmes : l’infidélité conjugale et le don d’organes, tout en dénonçant les lois rétrogrades tunisiennes.

Farès et Mariem forment un couple issu d’un milieu aisé et supposé progressiste. Ils ont des amis ouverts, sont francophones, boivent de l’alcool, travaillent tous les deux, et Farès a même résidé en France un certain temps. La famille est soudée et complice. Farès et Meriem sont proches l’un de l’autre, y compris physiquement. Ils se touchent, s’enlacent, s’embrassent, pleurent dans les bras l’un de l’autre…

Mais quid lorsqu’il y a infidélité ? Comment est-ce que ce couple, apparemment moderne, va-t-il se comporter ? Comment est-ce que chacun d’eux va réagir envers l’autre ? Pourquoi est-ce que dans nos sociétés l’infidélité masculine est plus facilement acceptée et pardonnée que l’infidélité féminine ? Lui avait déjà trompé, elle avait pardonné. Le fera-t-il ?

Ce qui est évident, par contre, c’est que la cassure est bien présente. D’ailleurs Farès et Mariem ne se touchent plus, ne se rapprochent plus. Ils s’en veulent et chacun reste dans son coin.

Sans cris ni hurlements, «Un fils» traite ce sujet de l’infidélité avec finesse, sensibilité et subtilité, sans tomber à aucun moment dans le mélodrame. Au contraire, le réalisateur a trouvé le moyen de nous faire partager la profondeur de la confusion et de la douleur des parents, eux-mêmes blessés dans leurs sentiments, mais aussi et surtout inquiets pour leur Aziz.

Farès adore son fils, c’est certain. Il est prêt à tout pour le sauver. Son instinct et son amour paternel sont mis à rude épreuve. Mais en fait, qui est le vrai père d’un enfant ? Le biologique ou celui qui l’élève ?

Sans jugements ni prêches moraux, «Un fils» aborde de nombreuses questions délicates et invite à de profondes réflexions sur des sujets divers, essentiellement sur la famille, mais aussi sur notre société et sur notre humanité. Il dénonce en chemin certaines lois rétrogrades : en 2011 (et d’ailleurs encore en 2019) le père tunisien est l’unique tuteur de ses enfants mineurs et est à ce titre le seul habilité à prendre les décisions importantes et à signer tous les papiers les concernant, comme si la mère était une incapable ou une intruse. Elle qui porte ses enfants en son sein, pendant neuf mois, n’a pas ces droits ! Quel est donc le rôle de la mère dans nos sociétés ? Une simple génitrice et gouvernante ?

Nos lois rétrogrades concernent plusieurs autres domaines, comme le don d’organes. D’ailleurs, elles contribuent de cette manière à compliquer les situations, à mettre en danger les malades et à encourager les trafics d’organes et les crimes. Ce qui est clairement montré dans le film.

Depuis sa projection le premier jour du Festival, «Un fils» suscite les débats ici au Caire. Les journalistes, les critiques et autres spectateurs disent à quel point ils ont aimé ce film, qui a su les intéresser énormément, aussi bien par les sujets abordés, que par la qualité de la réalisation et le jeu des acteurs, en particulier celui de Sami Bouajila, qui, d’après la réalisatrice palestinienne Najwa Najjar, porte carrément tout le film sur ses épaules grâce à son interprétation éblouissante et très convaincante de père meurtri, voulant à tout prix sauver son fils, sans pour autant renier ses principes. Les spectateurs sont par ailleurs souvent étonnés de découvrir l’existence de ces lois rétrogrades en Tunisie, la plupart d’entre eux pensaient que dans notre pays les hommes et les femmes étaient légalement égaux sur tous les plans.

C’est ce soir que se déroulera la cérémonie de clôture du CIFF et que les membres du Jury de cette compétition Horizons du cinéma arabe dévoileront les noms des lauréats. Est-ce que ce beau film tunisien sera parmi eux ?

Neïla Driss

Source : http://www.webdo.tn/


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