MODERNITÉ ET CRÉATIVITÉ, OU LE CONFLIT ENTRE LA MORT ET LA LIBERTÉ DANS LE FILM «MANMOUTECH» DE NOURI BOUZID

Par Dr. Samir ZOGHBI – tuniculture.net

«Il semble que le réalisateur Nouri Bouzid ait voulu vivre préalablement l’expérience de la mort. C’est d’ailleurs l’expression d’une expérience ontologique dans le sens le plus profond. L’artiste exprime la profondeur de l’existence, à travers une ambition ontologique qui ne connait pas les limites. Il semble que la mort dans ce drame s’exprime comme l’aspect le plus profond de l’ontologie cinématographique. La mort se transforme en un acte dramatique et se libère de son caractère tragique pour acquérir un caractère ontologique, à savoir, une expérience existentielle. La mort ne reflète pas la fin de ce drame cinématographique, mais c’est le début d’une nouvelle vie qui peut être plus fertile. Les thèmes du film s’entremêlent si bien qu’ils semblent disparates. La mort, la révolution, s’enchevêtrent et se discernent tels que la femme, le corps, la liberté, «le hijab», tous ces thèmes tournent autour d’une seule unité dramatique existentielle. Nouri Bouzid a conservé le même cheminement du cinéma tunisien en général. Et la spécificité de sa créativité consiste à procéder par la technique de l’absence de toute structure narrative de la chronologie des événements et de s’en tenir à une orientation réaliste du cinéma d’auteur, où le directeur est le fabricant principal du film. Cependant, nous trouvons une innovation inhabituelle chez Nouri Bouzid en voyant le cinéaste lui-même participer au cours du film en tant qu’acteur. Il faut également signaler l’émergence de la quantité des gros plans étranges au cinéma tunisien. La lutte pour la survie et la liberté caractérise le vocabulaire du cinéma, de même l’on signale le conflit entre le désir et la religion, le conflit entre la vie et la mort. Les femmes sont le principal moteur du drame. C’est bien un dilemme entre l’aspiration à la liberté et en même temps l’attachement à la féminité exprimée par l’actrice dans le film. Celui-ci marque le triomphe à la liberté dans tous les sens du terme. On y trouve, un rapport existentiel chez les héros entre le corps, le désir et la religion. Toutefois, la présence des femmes dans le film semble plus efficace. Et elles ne sont pas esclaves ou soumises à l’homme, mais elles semblent assumer un rôle propre à leur existence en tant que femmes. Nouri Bouzid n’a pas cherché à débarrasser les femmes de leur féminité. Au contraire, il a voulu montrer cette idée à travers une variété de plans et de scènes. La femme s’élève existentiellement à son autonomie et pour se maintenir en tant qu’être portant le sens de la beauté et du désir. La révolution comme évènement historique n’est pas conçue dans le film en tant que tel. Elle est l’occasion pour faire émerger les questions relatives à la liberté des femmes. Cela affirme le fait que le réalisateur ne voulait pas traiter l’évènement de la révolution selon une approche documentaire.

Samir Zoghbi.

Source : http://www.tuniculture.net/


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